« RESPIRE SACHA» OU COMMENT REBONDIR APRES UN BURNOUT DEVASTATEUR
Sacha, 26 ans au début du roman, mène sa carrière d’éducatrice spécialisée et sa vie de femme tambour battant. La pression quotidienne devient cependant très vite pesante et notre héroïne comprend très vite sans toutefois l’admettre qu’elle est sur le point de totalement craquer.
L’angoisse s'installe terriblement et progressivement, à son corps défendant et malgré des luttes qu’elle ne sait pas verbaliser (du moins au départ) viennent les crises de larmes incontrôlables qui laissent son compagnon, Neil, totalement impuissant, les insomnies chroniques qui creusent chaque nuit l’épuisement physique et émotionnel, et même un début d’anorexie traversées régulièrement par des idées de plus en plus sombres, au point que Sacha se surprenne parfois à penser furtivement au suicide. Non pas comme un choix librement réfléchi mais comme une option pour que cesse enfin la souffrance qui la détruit à petit feu.
Et pour ne pas sombrer, au plus fort des tempêtes intérieures qu’elle traverse avec beaucoup de courage, elle se répète mentalement sur tous les tons : « Respire Sacha ! Respire ! » … comme le naufragé qui s’accroche à sa bouée de sauvetage parce qu’il sait pertinemment que sa survie dépend d’elle.
Il lui faudra un an pour apprendre à se prioriser sans culpabiliser, pour écouter le murmure de l’enfant en souffrance qui hurlait à l’intérieur d’elle pour qu’elle l’entende enfin …. Un an pour renaître et respirer librement …. Enfin !
Les + que j’ai aimé
La couverture, d’un bel orange chaud, un peu flashy, qui donne un effet « peps » en laissant d’emblée deviner que l’histoire proposée se terminerait bien.
L’écriture de l’auteur d’abord, qui malgré le sujet traité, ne sombre jamais dans le pathos, ni dans les clichés faciles. Les chapitres volontairement très courts (guère plus de quelques pages) nous entraînent aisément dans l’histoire de Sacha. Et on hésita parfois entre la serrer simplement dans nos bras en la laissant enfin extérioriser ses émotions trop longtemps contenues, et l’envie de la secouer une bonne fois pour toutes afin de la faire « percuter », comme dirait certains jeunes de ma connaissance, sur l’urgence de se « faire du bien ».
Je me suis d’ailleurs reconnue dans le personnage qui aurait pu être ma parfaite et vraie jumelle, au point que, plus d’une fois, l’émotion m’a vraiment nouée la gorge, sans pour autant me faire renoncer à poursuivre ma lecture.
Ses proches enfin, de « Lumière », le chien labrador « croisé portes et fenêtres » qui est son premier thérapeute silencieusement fidèle, à Neil son compagnon qui l’aime vraiment d’un amour sans failles en passant par Natasha l’amie de toujours, Madeline ou le Père Paul, qui sait l’écouter sans aucun jugement. Enfin une mention spéciale au personnage de Lucette, cette dame beaucoup plus âgée que Sacha et qui, avec son franc-parler, contribuera aussi à l’entraîner sur son chemin de résilience personnelle.
Le – (qui n’en est pas vraiment un)
Le système de flashback rapide présent-passé m’a, je l’avoue, un peu gêné, mais ce n’est que mon avis personnel.
Je recommande la lecture de ce roman, qui dénonce les burn-out de plus en plus fréquemment tragiques, mais que notre société s’obstine souvent à nier. La balance survie-suicide, intelligemment évoquée fait comprendre au lecteur l’importance de choisir des valeurs authentiques et de ne pas céder au chant meurtrier des sirènes de l’ambition et de la pression socio-professionnelle H24.
Charlène Gros-Piron mérite une plus ample mise en lumière de son travail d’auteur. Si tous ses autres ouvrages sont dans la même veine, moi, j’adhère !